peut-être que non, j’en sais trop rien. Pas encore décidé.

- Je prends l’air. J’ai bien le droit. Même plus moyen de respirer sans déclencher une émeute…

 

J’entends Julie, qui ne me trouve pas drôle, rouspéter gentiment pour ne pas me brusquer. Je les vois venir, tous autant qu’ils sont. Ils peuvent toujours jacasser, ils ne réussiront pas à me la passer, la camisole, je ne les laisserai pas faire.

 

- Arrête de jouer les sirènes de malheur, Julie. Je ne vous laisserai ma peau que lorsque je ne serai plus dedans.

 - Alors descends de là, et garde-la pour toi, ta sale peau. On n’en a rien à branler!

 

La gentillesse de Julie a pris le bord. Je savais bien que ce n’était pas normal, tout ce miel. Et là-dessus, la voilà qui se met à chialer. Je l’entends qui s’approche dans mon dos.

 

Attention! Ne me touche pas ou je saute. J’ai tout de même le droit de choisir l’heure, non?

 

Elle a les sanglots longs comme les violons de Verlaine qui prennent la poussière dans le grenier où les messieurs du Saint-Sulpice ont remisé le mal et les poètes maudits. Tout de même, ils n’ont pas pu empêcher Tess de les mettre au programme de sa classe de littérature, les symbolistes. (…) 

 

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Voilà. C’est là où j’en suis, sur le bord de la fenêtre du bureau de Tess, les pieds qui pendent au bout de la vie, entre le noir et le vide, l’âme dans le néant, le cœur au pain sec et à l’eau, à me demander si je plongerai ou pas dans l’ouragan qui me l’a emportée.

 

Il y a Julie derrière moi, qui pleure sans me le dire, je le sens, et qui voudrait que je choisisse le monde des vivants, dont je ne suis pas encore tout à fait parti. Et il y a les autres en bas, avec aux premières loges des curieux transis, Oscar, Le Rachi avec sa Jeune Fièvre au bras, dans tous ses états parce qu’elle n’a jamais vu de si près quelqu’un qui veut couper les ponts au point de se jeter en bas, et jamais vu tant de morts en si peu de temps, même si je n’en suis encore qu’une puissance. Et il y a les autres dans le corridor, que Julie parvient à tenir à l’écart pour le moment, parce qu’elle a fermé la porte à clé et appuyé la bibliothèque devant: Tess, qui ne sait plus où se mettre parce qu’elle a peur de perdre un élève, et son job par-dessus le marché; Pelvisius, qui a peur pour mon âme et pour la réputation de son collège. Même Nihil, qui ne peut pas me blairer, veut absolument me parler. C’est toujours au moment de partir qu’on se découvre des amis qui vous veulent du bien, quand on décampe qu’on vous aime comme ce n’est pas imaginable. Mais il s’énervent pour rien, ou

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Larry Volt. Ce nom lui va comme un gant, lui colle à la peau. Il en est fier. C’est un nom parfait pour un mouton noir, pour un bouc enragé. Et puis, c’est infiniment mieux que Larry Tremblay.

 

La révolte, il la couve depuis toujours. Pour lui, la vie est un combat et pour parer les coups, il suffit d’en donner. Larry frappe. Fort. Et pourquoi pas? Il a dix-huit ans. Il étudie au séminaire du Saint-Sulpice. Il hait le conformisme et les idées reçues. Il a peur mais ne le dit pas.

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Zone de Texte: Les premiers paragraphes du roman

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