« Premier prix, classe de deux ans, ruban bleu, propriété Richard Arland, ferme Morency, caractéristique Arshyre. »

 

Le haut-parleur hurle et se tait. Depuis dix heures ce matin, c’est ainsi.

 

Les juges, armés, d’une canne blanche, circulent autour de l’animal. Ils s’arrêtent, repartent, s’arrêtent, font courir la bête, la font marcher, la tâtent, l’inspectent, lui ouvrent gueule, poil, œil, pressant les flancs, tirent le pis, pincent la peau. Ils se consultent du coin de la bouche, du coin de l’œil, du coin du sourcil, du coin du geste. On épingle des rubans au cou des vainqueurs, puis on annonce une autre classe.

 

Du haut des cabriolets et des banneaux et des expresses et des camions qui font cercle derrière les câbles, la population flâne, applaudit, siffle, dort; femmes-esclaves, vieillards malins et méchants, gros engagés, bouche pleine de tabac, heureux de chômer une journée de semaine. Et cela doit finir avec le soleil couchant après le discours de monsieur le député.

 

Derrière cette foire, derrière toute cette odeur de chair, d’oignons frits et de cuir, il y a la forêt. Et dans la pente de la forêt près d’un cours d’eau froide, des jeunes gens de l’île font leur propre exposition, leur fête, une parodie de l’autre.

 

« Combien pour la vache » crie le Bouclé, dit La Terreur, en montrant sa maîtresse qui tourne sur une souche, les lèvres collées sur une bouteille de vin. « Touchez la viande, combien la vache »...

  

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La direction du terrain de foire est indiquée par des drapeaux rouges et blancs au bout de piquets bordant le chemin. Le soleil coule de partout.

 

En plein milieu d’un champ près du quatrième village, toute la population, six paroisses, s’est donné rendez-vous. Femmes, vieillards, écoliers cultivateurs, marchands, ceux de la briqueterie, quelques religieux, des pêcheurs, beaucoup de gens de la ville de fer, les jeunesses du pays avec leurs blondes, leur coup de whisky en poche, et leur désir de passer une journée bruyante.

 

Au centre, le kiosque à fanfare les tentes à liqueur, la boîte des juges; derrière, le coin des charlatans qui vendent tubes de colle, parfums et onguents; à gauche, des gens venus de la ville avec leur comptoir portatif; à l’entrée des photographes et les pickpockets; à droite, les propriétaires sous la tente des riches et partout des animaux, surtout les animaux. En longues files, le long des clôtures de perches, attachés aux roues des charrettes, au bout d’un pieu, veaux, vaches, chevaux, chèvres, lapins en cage, cochons à la peau d’homme gras. Et ils sont tous lavés, sabots luisants, crinières frisées, cornes étincelantes, passées à l’huile d’olive, étrillés brossés, rebrossés, ruban dans la queue, collier neuf au cou, grelots sur la croupe. L’air est plein de beuglements, de rires, de cris de coq, de fritures, d’aboiements de chiens, de hennissements, de jurons, de gloussements, de pleurs d’enfants et de bruits de chaînes.   

Zone de Texte: Le plaisir de lire

Ce fou est un homme venu on ne sait d’où, qui jette le trouble dans les consciences par ses paroles et ses attitudes non conformistes. À son contact, les gens sont tentés de s’arracher à leurs mesquineries, à leur résignation, et de devenir meilleurs.

Ce fou dérange les habitants de l’île par sa manière d’agir et par ses paroles. Malgré lui, il va se faire des ennemis qui vont vouloir le chasser car ce fou dérange. Mais le fou n’est pas celui qu’on pense. Ce roman est encore d’une grande actualité dans ce monde qui se cherche.

Zone de Texte: Romans du Québec
Zone de Texte: Les premiers paragraphes du roman

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