« Pas de panique, mon vieux! Ce n’est pas la mer à boire. Les livres, c’est ce qu’il y a de plus facile à trier. Ensuite, il suffira d’appeler des déménageurs qui se feront un plaisir de tout embarquer. Il leur faudra sans doute un cinq tonnes, mais c’est leur affaire, après tout. Quant aux vêtements, pas de problème: l’Armée du Salut prendra le tout. »

 

Il se demanda ce que ferait l’Armée du Salut d’un lot de costumes trois pièces en serge grise datant de la dernière guerre, mais les sans abris était sans doute moins difficiles. Il sentit un peu de son courage lui revenir. Le département d’Histoire de l’université d’Oxford lui avait accordé un mois de congé pour régler la succession du révérend. Peut-être que cela suffirait. Dans ses pires moments de découragement, il lui semblait qu’il en aurait pour des années.

 

Il s’approcha de l’une des tables et tourna entre ses mains une bonbonnière en porcelaine. Elle était remplie de gaberlunzies en plomb, insignes rectangulaires que les paroisses distribuaient sur leur territoire. Près de la lampe se trouvaient une collection de flacons en grès  et une tabatière en corne incrustée d’argent. Qu’en faire? Léguer le tout à un musée ? Qui serait intéressé?  Passionné par l’histoire de sa région, le révérend avait fait du XVIIIe siècle son terrain, de prédilection et la maison regorgeait d’objets et de documents liés  aux mouvements jacobites.

 

Roger caressa du bout des doigts l’inscription gravée sur le couvercle de la tabatière:  Diacres et Trésoriers de la Corporation des Tailleurs de Canongate, Édimbourg, 1726. Pourquoi ne pas garder pour lui certains des bibelots les plus précieux du révérend?… Il se reprit aussitôt, secouant la tête d’un air résolu.

 

- Pas question ! C’est comme ça qu’on finit clochard !

 

On commençait toujours par conserver quelques objets auxquels  on accordait  sottement une valeur sentimentale, puis on en rajoutait d’autres, et d’autres, et d’autres encore, se prenant au jeu du collectionneur. Bientôt, on ne pouvait plus se séparer de rien, et on vivait au milieu d’un véritable capharnaüm accumulé de génération en génération.               

Roger Wakefield était planté au milieu de la pièce, ne sachant par où commencer. Non qu’il se sentît seul, loin de là : autour de lui était ressemblé un énorme bric-à-brac de souvenirs de famille, de paperasserie et d’objet hétéroclites glanés on ne sait où. Le bureau était saturé de tables prêtes à s’écrouler sous les papiers, de lourds fauteuils victoriens garnis de têtières brodées, de coussins au point de croix et de toiles indiennes, et de petits tapis jetés sur le parquet ciré, prêts à se dérober sournoisement sous un pied de innocent. Et encore! Ce n’était là que l’une des douze pièces pleines à craquer de meubles, de vêtements et de dossiers. Sans compter les livres, encore des livres, rien que des livres…

 

Trois des murs de bureau était tapissés d’étagères qui ployaient sous le poids des livres. Des romans policiers aux jaquettes bon marché étaient empilés en hautes colonnes instables et colorées au pied de rangées serrées d’éditions de luxe reliées en agneau. Des albums illustrés étaient écrasés entre les volumes rares arrachés à l’oubli sur les étals de bouquinistes. Et, tout autour, pointaient les bords écornés  et jaunis de milliers de pamphlets, de brochures, de tracts et de manuscrits brochés à la main.

 

Le reste du presbytère était à l’avenant. Il n’y avait pas une surface plane qui ne soit encombrée de livres et de papiers. Dans toutes les pièces, armoires et placards menaçaient d’exploser sous la pression. Il faut dire que le révérend Reginald Wakefield, défunt père adoptif de Roger, avait mené plus de quatre-vingts ans d’une existence bien remplie, au cours de laquelle il semblait n’avoir jamais rien jeté.

 

Roger eut une envie soudaine de prendre ses jambes à son cou, de se jeter dans Austin Mini et de rentrer en trombe à Oxford, abandonnant la maison où il avait grandi à la merci des intempéries  et des voyous.            

Zone de Texte: Le plaisir de lire
Zone de Texte: Premiers paragraphes

Dans ce deuxième volet, nous retrouvons Claire Beauchamps-Randall en 1968. Son mari vient de mourir et elle emmène sa fille Brianna en Écosse, sur les lieux mêmes où, vingt ans plus tôt, elle avait été transportée dans le temps, dans l’Écosse du XVIIIe siècle.

 

Et voilà que l’incroyable se produit de nouveau. Claire retrouve l’Écosse où son jeune époux Jamie est devenu hors-la-loi. Ensemble ils réussissent à gagner Paris et vont à la rencontre du prétendant au trône d’Écosse et d’Angleterre, Charles-Édouard Stuart. Leur but: changer le cours de l’histoire. 

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