- Que cherches-tu, Sassenach?

- Duncan ne devrait-il pas être près de ta tante?

 

À voir Jocasta ainsi, personne ne pouvait deviner qu’elle était aveugle. En réalité, les grandes vasques de chaque côté lui permettaient de se repérer dans l’espace, pendant qu’Ulysse lui chuchotait à l’oreille le nom des invités qui approchaient. Je la vis lever légèrement sa main gauche, ne rencontrer que le vide et la rebaisser. Son expression ne changea pas. Elle hocha la tête avec un sourire, puis répondit au juge Henderson qui lui parlait.

 

Ninian haussa le menton et les sourcils, essayant de regarder avec discrétion par-dessus les têtes sans se hisser sur la pointe des pieds. Puis, l’air taquin, il suggéra :

 

- Le promis aurait-il pris la poudre d’escampette avant sa nuit de noces? J’avoue qu’à sa place, je me sentirais aussi un peu nerveux. Votre tante est une belle femme, Fraser, mais, si elle le voulait, elle pourrait geler les roubignoles  de l’empereur du Japon d’un seul regard.

 

Jamie esquissa un sourire.

 

- Duncan a sans doute été pris d’un besoin pressant, dit-il. Je ne sais pas ce qu’il a, mais il s’est déjà rendu aux cabinets d’aisances quatre fois ce matin.

 

Cela m’étonna. Duncan souffrait de constipation chronique. Je lui avais d’ailleurs apporté un sac de feuilles de séné et de racines de caféier, m’attirant les remarques acerbes de Jamie sur ma conception d’un cadeau de mariage. Le futur marié devait être encore plus nerveux que je ne l’imaginais.

 

Répondant à Hamilton qui venait de lui murmurer une remarque à l’oreille, Jamie déclara :

 

- Cela ne devrait pas surprendre ma tante, étant donné qu’elle a déjà eu trois maris avant lui. En revanche, c’est le premier mariage de Duncan. C’est toujours un choc pour un homme. Je me souviens de ma première nuit de noces comme si c’était hier !                  

- Tu crois qu’ils coucheront dans le même lit?

 

Jamie n’avait pas parlé fort, mais sans pour autant baisser le ton de sa voix.  Heureusement, nous nous tenions à l’autre bout de la terrasse, trop loin pour que la maîtresse de maison puisse nous entendre. Néanmoins, plusieurs têtes s’étaient tournées vers nous.

 

Ninian Bell Hamilton nous dévisageait fixement. J’adressai mon plus beau sourire au vieil Écossais et le saluai brièvement avec mon éventail fermé tout en envoyant un coup de coude dans les côtes de Jamie.

 

- Un neveu respectueux et bien élevé ne pose pas ce genre de question sur sa tante ! sifflai-je entre mes dents. Prudent, Jamie s’écarta hors de portée en arquant les sourcils, l’air surpris :

 

- Quel rapport avec le rapport? Ils sont sur le point d’être mariés et ont tous deux largement dépassé l’âge légal.

 

Ninian  avait du mal à contenir son hilarité. J’ignorais l’âge exact de Duncan Innes, mais je lui donnais dans les cinquante-cinq ans. Quant à Jocasta, la tante de Jamie, elle en avait au moins dix de plus.

 

Je l’apercevais par-dessus les têtes de convives, à l’autre bout de la terrasse, acceptant gracieusement les vœux des amis et des voisins. Grande et drapé dans une robe rouille, elle se tenait entre deux immenses vasques en pierre d’où jaillissaient des bouquets de gerbes d’or séchées. Ulysse, son fidèle majordome noir, était posté juste derrière elle, raide et digne dans sa perruque poudrée et sa livrée verte. Véritablement reine de la plantation de River Run, Jocasta, Duncan était couronnée d’un élégant bonnet en dentelle blanche qui mettait en valeur ses traits fiers de MacKenzie et ses pommettes saillantes. Je me dressai sur la pointe des pieds, cherchant des yeux son prince consort.

 

Légèrement plus petit que Jocasta, Duncan aurait dû, malgré tout, être visible. Plus tôt dans la matinée, je l’avais aperçu vêtu de ses habits d’apparat de Highlander, resplendissant dans ses couleurs écarlates, quoique terriblement mal à l’aise. Je tordis le cou à droite et à gauche, posant une main sur l’épaule de Jamie pour conserver mon équilibre. Il me retint par le coude.                

Zone de Texte: Le plaisir de lire
Zone de Texte: Premiers paragraphes

La première partie de LA CROIX DE FEU débute en 1770, alors que le couple Claire et Jamie Fraser se trouve en Caroline du Nord, à la veille de la guerre de l'Indépendance américaine.
Un double mariage - celui de la fille de Claire, Brianna, et celui de la tante de Jamie, Jocasta - est en préparation.
Mais la cérémonie est interrompue par l'arrivée d'un ordre du gouverneur Tyron à l'intention du colonel Jamie Fraser : constituer, au nom de Sa Majesté, une force armée prête à intervenir en cas d'urgence.
Dans le second tome, le colonel Fraser s
'engage dans la bataille d'Alamance et l'infirmière Claire doit déployer tous ses talents afin de sauver ceux qu'elle aime, allant même jusqu'à fabriquer de la pénicilline !
Bien d'autres événements inattendus mettent à l'épreuve les habitants de Fraser's Ridge : l'ignoble violeur Stephen Bonnet réapparaît ; Jamie découvre Claire dans les bras d'un jeune homme fougueux ; la mort d'une esclave remet en cause les actions de "la sorcière soignante".
Les rebondissements ne manquent pas dans cette conclusion qui se déroule sous le signe de l'action.
La sage de DIANA GABALDON repose
sur la fantaisie romanesque du voyage dans le temps.

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