Des faubourgs cossus où habite l'élite mulâtre jusqu'aux bas quartiers où vivote la populace, la nuit fait son nid d'ombre. À la brunante, ses agents dressent des postes de contrôle et interceptent quiconque n'a pas encore regagné la sécurité bien précaire du logis. Avec la bénédiction de “Notre -Doc-qui-êtes-au-Palais-à-vie”, les hommes de la nuit exigent des imprudents un tribut payable en argent ou en nature, s'ils ont de la chance, avec leur chair et leur sang, s'ils en ont moins. Rarement revoit-on ces malheureux, interpellés aux carrefours à l'heure des croque-mitaines, mais on raconte qu'ils hantent les catacombes sous le Palais national, transformés en zombis. |
Le crépuscule donne à Port-au-Prince des airs de bête blessée sur laquelle les ténèbres s'abattent telle une volée de vautours. Dans une débâcle sanglante, le soir renverse le jour, hisse son drapeau noir, se proclame président à vie. Et lorsqu'il daigne laisser poindre le soleil, ce n'est que pour mieux le guillotiner de nouveau. |
Gabriel est musicien. Tous les soirs, les sons envoûtants de sa trompette percent l'atmosphère enfumée des boîtes de jazz. Les hasards d'une tournée le ramènent dans sa ville où il retrouve Laura. Un amour caché. Une passion inavouable. Brusquement, Gabriel est en proie à des visions étranges. Des obsessions effrayantes et sanglantes. Des images de mort et des mots murmurés dans une langue inconnue surgissent du plus profond de lui-même et le déchirent. Angoissé, il ne comprend pas, ne se reconnaît plus. Bizarrement, ailleurs dans la ville, quelqu'un d'autre souffre d'un mal semblable... |
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